jeudi, décembre 07, 2006

EQUATEUR, EqUaTeUr, éQuAtEur: Six mois après le retour, qu reste-t-il de l'aventure?

Après huit mois à Quilla Pacari, je suis de retour à Paris. La boulangerie de Chancahuan fonctionne apparemment bien, et le moulin de la communauté tourne depuis quelques semaines.
Tout cela me semble bien loin… je me demande parfois si je n’ai pas rêvé.







Retour sur quelques souvenirs :

C’était un de mes derniers jours là-bas. Je rentrais de la boulangerie, nous avions fait plus de trois cent pain… Journée bien fatigante mais satisfaisante. Le repas pris (soupe, riz, oeufs si je me souviens bien) je décidai de repartir avec Pierrick à la réunion du projet des lamas qui avait lieu à Palacio Real.
Palacio, je n’avais pas de raison particulière de m’y rendre, sinon l’ambiance particulièrement sympathique qui régnait autour du chantier de construction du restaurant et de la filature. Ramón et Vicente étaient toujours là avec leur incroyable enthousiasme et bonne humeur. Il me suffisait de saisir une pioche, ou une pelle, et ils s’amusaient de me voir manier les outils, petite blanche qu’ils imaginaient plus volontiers assise derrière un bureau que les mains dans la terre (ils n’avaient d’ailleurs pas tort au fond, j’ai regagné le bureau, mais la pioche me manque un peu…). Nous rigolions de ma maladresse.
A Chancahuan, la communauté où se trouve la boulangerie, j’avais une fonction, on attendait quelque chose de moi, je tâchais d’être à la hauteur. A Palacio, je venais juste pour partager, pour donner un coup de main en échange de quelques sourires et de trois mots qui viendraient s’ajouter à mon petit cahier sur lequel je notais le vocabulaire quichua.
Un des derniers soirs disais-je, la réunion sur le projet des lamas se tenait dans la grande salle froide du village. Je revois tous ces hommes et femmes, assis sur des petits bancs très bas, en arc de cercle. La porte était restée ouverte et les chiens allaient et venaient. Je m’enroulais tant bien que mal dans mon écharpe multicolore pour ne pas geler pendant que Pierrick exposait la suite des évènements : la fin des travaux, les premiers invités, les futurs touristes… Puis Carmen traduisait (ou plutôt interprétait !) en quichua.
La fin de la réunion approchait et j’avais envie de dire quelques mots. De saluer tous ces regards croisés sur les chemins, ces hommes et ces femmes qui m’avaient fait découvrir leurs traditions, partager leurs espoirs. Je voulais les remercier, leur souhaiter bonne chance pour ce projet dont ils rêvent mais qui leur parait si énorme qu’ils se demandent parfois s’ils seront à la hauteur pour en assurer le fonctionnement. Je pense que oui…
Je tournais et retournais trois phrases en quichua dans ma tête. Le Président de communauté fit le discours final, demanda si quelqu’un avait quelque chose à ajouter, le silence retomba sur l’assemblée. Je me lançai : « ñukaka shuk tantaruranahuasipi llankakuktani…. ». La soirée s’acheva, je me levai encore toute troublée d’avoir réussi à dire quelques mots de quichua, triste à l’idée que je ne les reverrai peut-être pas, ces gens de Palacio.
Je revins à moi lorsqu’une femme me tira par la manche. Je ne sais plus trop comment ça s’est fait, mais je me suis retrouvée avec une chalina bleue autour du cou. La chalina, c’est cette grand écharpe qui sert à porter aussi bien les enfants que les pommes de terre, ou juste à avoir moins froid, quand on la met sur les épaules. Me voyant grelottant, elle –dont je ne connaîtrai jamais le prénom- m’avait mis sa chalina autour du cou. J’hésitais à accepter, mais étais trop touchée par l’intension pour refuser. Je lui proposai l’échange, lui tendis mon écharpe multicolore. L’assemblée dont j’avais oublié l’existence applaudit. Mais étions aussi contente l’une que l’autre.
C’est peut-être cela la richesse de l’échange.

En Europe, au retour :

Au début, j’en voulais à tous ces gens de paraître si tristes alors qu’ils vivent dans l’opulence. C’était les premiers jours, ceux où je sortais dans la rue avec ma bayeta et mon chapeau. Ça n’a pas pu durer. Troisième jour, ma petite sœur me dit qu’elle est ravie que j’aille la chercher à la gym mais de préférence en « tenue normale ». C’était la grande sœur d’avant qu’elle voulait retrouver. Je me normalisai.
A présent, je refais tout « comme avant », métro, cours, studio en solitaire, sport, vacances en famille.
Il me reste un pincement au cœur lorsque je croise des hispanophones.
Une pointe de nostalgie quand les photos d’Equateur défilent sur l’écran de veille de mon ordinateur.
Et même quand il ne fait pas vraiment froid, une chalina bleue toujours autour du cou.

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mardi, octobre 31, 2006

Un clin d'oeil de Saint Exupéry

En quelques mots:

Retour à Paris dans un studio clair et agréable à vivre, retrouvailles sympathiques.
Reprise de la vie parisienne, animée, passionnante mais épuisante.
Sciences Po, master management de la culture, spécialité presse et édition. J'apprends des choses passionnantes (qui édite quoi? Pourquoi? Comment?), je me demande si je vais passer ma vie dans et avec les livres... Affaire à suivre.
J'écoute Bach en lisant Saint Exupéry histoire de ne pas oublier l'essentiel...


«Vieux bureaucrate, mon camarade ici présent, nul jamais ne t’a fait évader et tu n’en es point responsable. Tu as construit ta paix à force d’aveugler de ciment, comme le font les termites, toutes les échappées vers la lumière. Tu t’es roulé en boule dans ta sécurité bourgeoise, tes routines, les rites étouffants de ta vie provinciale, tu as élevé cet humble rempart contre les vents et les marées et les étoiles. Tu n’es point l’habitant d’une planète errante, tu ne te poses point de questions sans réponse : tu es un petit bourgeois de Toulouse. Nul ne t’a saisi par les épaules quand il était temps encore. Maintenant, la glaise dont tu es formé a séché, et s’est durcie, et nul en toi ne saurait désormais réveiller le musicien endormi ou le poète, ou l’astronome qui peut-être t’habitait d’abord."

vendredi, septembre 22, 2006

On en revient toujours, à ses premières amours...




Malraux... Un matin paresseux de retour de voyage, réveillée par le décalage horaire mais pas tout à fait prête à agir pour autant, je pioche dans la sélection de cassettes VHS que j'ai empruntées à l'institut français la semaine dernière. Bourdieu, Malraux, ou Cartier Bresson? Mon élan de paresse se poursuit et je n'innove pas beaucoup en choisissant de revoir un documentaire sur Malraux (La Grande Vie), que j'avais déja dû voir en terminale. Et là, surprise: je ne connais pas ces images, les premières, qui ouvrent le documentaire sur la figure d'un intellectuel bosniaque parlant de Malraux dans les ruines d'une bibliothèque. Lui succède la voix de Clara Malraux, l'épouse, qui témoigne les yeux pétillants de vitalité et d'intelligence. "Peu de temps après que nous nous sommes rencontrés, il fit la réflexion suivante: "Vous ne croyez tout de même pas que je vais travailler, aller au bureau à 9 heures, manger dans un bistrot et reprendre à 14h30..." Quelques semaines plus tard, ils embarquaient pour les temples de l'Occident, le pillage des statues (c'est aussi cela Malraux... ), Bénarès, l'Egypte.


Je me retrouve scotchée à l'écran, je reconnais les images classiques, les clichés de la guerre d'Espagne, la poignée de main avec De Gaulle en Alsace. Je découvre, fascinée, certains témoignages. Surtout je retrouve l'écrivain qui n'oublit jamais de vivre avant d'écrire, de se mêler aux combats des peuples avant de se faire journaliste.


J'en profite pour glisser un lien vers le site que j'avais réalisé en terminale... (www.4regards.fr.st) Je découvrais l'élan de la reconstruction dans l'après-guerre, le formidable espoir de toute une population, les idées nouvelles d'Europe (plus concrètes que de par le passé), la reconstruction. Le thème des (fameux) tpe étant "Les élites", j'avais choisi 4 figures emblématiques de l'époque, Satre, Camus, Malraux et Monnet. Le pouvoir qu'ils exercent encore sur moi ne semble pas s'effacer avec les temps et mes quelques confrontations à la réalité ...

En tant qu'expatrié, il est facile mais aussi dangereux de ne voir de la France que la vitrine que les Instituts Français en donnent, et je me souviens des conversations houleuses au sujet du mythe Malraux de ces temps-là avec mes professeurs qui me trouvaient décidemment bien candide et idéaliste. Malraux, c'eat aussi celui qui réécrit un peu l'Histoire et se créé, en autodidacte fabuleux et orgueilleux, son histoire de l'art souvent remise en cause par les professionnels. Celui qui commandait une escadrille d'aviation en Espagne en 1936, ne connaissant lui-même rien au pilotage...

Par delà les controverses, la symbolique de l'écrivain et du politique engagé subsiste... Les critiques à cet articles sont ouvertes!

jeudi, septembre 21, 2006

Entre trois pays : nordique, scandinave et balte

A l'origine, l'idée était d'occuper avec mon frère, passé lui aussi au statut d'étudiant ne reprenant les cours que début octobre, notre mois de vacances. Plutôt que de rester tranquillement au chaud dans l'habitation familiale danoise, pourquoi ne pas explorer un peu les environs? Les environs danois? Hormis le camping sur la côte sauvage ou la tournée des "bed and breakfast" au milieu de nulle part (j'arrête parce que là je vais avoir des réactions violentes...), les perspectives nous semblaient limitées...
Nous avons aussi envisagé, pas vraiment sérieux, un tour d'Europe. Mais nous avons peu l'habitude de voyager tous les deux, n'avons pas les mêmes objectifs, pas la motivation pour organiser, le train est beaucoup plus cher que prévu...
Nous nous rabattons au final sur la Finlande et l'Estonie en une semaine, Talinn n'étant qu'à... 100 minutes de bateau d'Helsinki.
Petite esquisse de "comparaison"; de ces trois pays...

Le Danemark,
Ses vélos pour tout le monde et à toute heure par tous les temps,
Les bottes, du caoutchouc au cuir, comme un uniforme -c'est pratique pour pédaler!
Le parler étrange et les sons gutturaux, mots heurtés et très accentués,
Les supermarchés sans musique et sans même un murmure,
Les errances du vendredi soir une bierre à la main,

L'hiver, à pieds ou à vélo, c'est la lutte contre le vent glacé,
La mer d'huile reposant sous un ciel bas et louds,
Un bateau échoué sur le sable fin, un bateau de pêche, le capitaine était ivre.
Les terres proches de la taiga, cette étendue plane à perte de vue, sans arbre.
Mais ici, pas de neige, il fait froid sans le paraitre,
C'est'indifférence, de la nature et des hommes,
Du moins au premier abord...

Le sud de la Finlande,

Helsinki, capitale ouverte sur la mer,
Son marché aux poissons et sa halle d'antan,
Ses deux cathédrales, protestante et orthodoxe, majestueuses,
Ses rochers, ses arbres en plein centre ville comme autant de traces d'une nature à laquelle l'homme s'est toujours adapté mais qu'il n'a jamais vraiment domptée.

Cet hiver il fera moins 30, et les monstrueux brise-glace feront la route vers l'autre rive de la Baltique...

A quelques kilomètres de la capitale, les étendues lacustres qui scintillent sous le soleil,
Les villages sont cachés dans les forêts,
Les estuaires partagent les bourgs, les bateaux vivent en centre ville, semblant ne jamais pouvoir rejoindre la mer, et pourtant...


Talinn, un aperçu de l'Estonie
Bien protégée par les remparts,
Un ville moyennageuse,
Fraichement repeinte aux couleurs vives.
On sent la gloire perdue des années où le commerce hanséatique conférait puissance et prestige à ce même lieu.
Les ruelles étroites débouchent sur des points de vue imprenables d'où l'on repérait jadis l'ennemi.

Et puis, de l'autre côté des remparts, la fourmilière, la construction de centres commerciaux, hôtels de luxe, centre sportif.
On devine un peu plus loin une misère encore présente, les hésitations entre nostagie et espoirs.

Et tout ça, c'est (un petit bout de...) l'Europe !

dimanche, septembre 10, 2006

Aventure Milan- Bayard, suite...


Jeudi,
D'abord, il y a eu la vingtaine de cartons à charger, décharger, ouvrir. Des magazines à déballer, encore et encore. C'est la revue du mercredi de l'enfance qui envahit le salon comme une marée. Des centaines d'exemplaires de Popi, Picoti, Belles Histoires, J'aime lire, Astrapi, Wakou, Wapiti, Phosphore qu'il faut classer, trier. Des exemplaires neufs, des mois derniers, invendus. A l'envie de lire se mêle l'écoeurement du trop. Aux souvenirs de moments passés sur le canapé, "Encore une histoire, Maman, après on va se coucher", se superpose l'excès, le trop de culture prémâchée.

Une fois les piles réalisées, les 1234 photocopies terminées il faut concocter les sacs par classe: Maternelle 1: 23 offres d'abonnements, Un Picoti et deux Pommes d'Api pour la maitresse. CM2: un Astrapi, un Images dOC....
Heureusements que mes fidèles assistants ne m'ont pas abandonnée!!! Sinon c'est bien tard dans la nuit que j'aurais fini!


Vendredi,
Et me revoilà à jouer à la petite marchande... après la vente du pain, le service des fondues et raclettes, me voilà avec des abonnements. Le jonglage des langues reprend: quelques parents parlent français, les Danois choisissent de communiquer avec moi en anglais pour la plupart, une grand-mère s'enchante de découvrir que je parle espagnol: elle ne parle pas plus français que moi danois !
Drôles de classes que celles qui regroupent ces enfants venus de partout et qui n'ont pour seul point commun que de choisir comme langue d'étude le français...
18H.... No comment!

mercredi, septembre 06, 2006

Que faire d'un mois au Danemark?

Je suis arrivée ici le 20 août, à la veille de la rentrée scolaire danoise. C’était plus tôt que prévu, mais vu l’intensité du travail à l’alpage, je n’étais pas fâchée de voir l’heure du repos arriver. Pourtant, le retour a supposé une adaptation de plus, fin du travail, de la responsabilité. Journées libres à occuper en prenant en compte les emplois du temps respectifs des autres membres de la famille. Mais pas facile de passer l’après midi à attendre le retour de l’un ou de l’autre qui, aussitôt arrivé et dit bonjour, se replonge dans son travail, ses devoirs ou ses activités (chose au fond assez logique, tout le monde ne peut pas être en vacances jusqu’au 8 octobre !!!)
Coté intégration danoise, il m’a fallu du temps pour dépasser le stade de l’observation passive à la manière de la soirée de quartier. A présent, je m’amuse à prononcer le moins de mots possibles lorsque je fais les courses ou que passe le facteur pour faire illusion : j’en avais assez que l’on me prenne pour une idiote et me regarde de haut sous prétexte que je ne parle pas LEUR langue (qu’ils placent eux mêmes au panthéon des trois langues aux sonorités les plus barbares, les deux autres étant le suisse allemand et le flamand…).
Peu à peu, les contacts avec les milieux français de Copenhague m’ont permis de faire connaissance d’une prof de maths sympa chez qui nous alternons avec Flo parties de tarot, soirées crêpes et sorties ciné. Nos vélos de montagne usent plus qu’avant leurs pneus sur les routes locales, preuve d’indépendance : quel délice de rentrer à deux heures du matin dans les rues désertes en roulant comme des fous !
Et puis, un peu de travail m’est aussi tombé du ciel, ce qui ne doit pas arriver souvent dans la vie. Tout d’abord, une présentation d’une heure sur l’Equateur en espagnol à préparer pour différentes classes du lycée. Et surtout, un coup de téléphone ce matin pour me proposer d’organiser la vente des abonnements Bayard jeunesse en maternelle, primaire collège lycée. Au programme des jours à venir donc : lecture des différents magazines proposés, préparation des bulletins d’abonnement, puis permanences à l’école et présentation des offres aux professeurs. Motivant !

jeudi, août 31, 2006

Quelques clichés de l'été... vacances à la montagne!